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Ahimsa et Shanti – Un couple uni – par Julie Deblois

Par 28 mars 2024Blogue

Peut-être à cause du thème du colloque du CTY, tellement collé à la fois à l’actualité (qui me fait peur) et à mes démarches personnelles depuis ma formation professorale, j’ai le désir de partager avec vous mes réflexions sur la notion de Shanti. 


La paix… 

D’où vient-elle?  

Est-ce que les nouveau-nés naissent avec, au cœur de leur être, une paix qui viendra se morceler petit à petit lors de leur croissance?  Si la paix décroit au fil de la vie, comment la nourrir afin de la préserver?  Est-ce que la notion de paix change que l’on soit née fille ou garçon ou encore que l’on soit né en occident ou en orient?  Est-ce que les personnes qui sont plus scolarisées arrivent à ressentir plus de paix et à agir en tant que tel, ou si au contraire, en savoir moins nous aide à cultiver la paix? Et est-ce que la paix peut vivre et même survivre en nous si nous ne cultivons pas Ahimsa de façon constante?  Est-ce que la non-violence découle de la paix que l’on éprouve ou bien si la paix n’est possible que si la non-violence est bien ancrée en nous? 

Je discutais de ce sujet avec mon amie et formatrice de yoga ainsi qu’avec une amie et collègue de ma cohorte de post-formation (quel bonheur de parler philosophie du yoga autour d’un verre de vin après un bon repas, non?), et Geneviève a pensé à une analogie que je trouve à la fois belle et poétique. Elle illustre bien ce qui pourrait être l’une des réponses à mes questionnements. 

Imaginons que la lune est Shanti et qu’Ahimsa est le soleil. Le soleil bouillonnant, un feu brûlant tant à sa surface qu’en son cœur. La lune plus calme, plus froide, mais toujours présente; même lorsqu’elle est invisible pour nous, son grand pouvoir agit tout de même et influence les cycles des marées (entre autres). 

Le soleil et la lune formeraient-ils un de ces couples fusionnels dont on ne peut dire lequel des deux influence l’autre? 

Ahimsa, arrêter le combat! 

Oui? L’histoire est pourtant faite de personnes ayant utilisé la non-violence pour combattre les injustices et l’ordre établi!  

L’exemple de Gandhi est celui qui me vient en tête en premier, vient ensuite l’image de Nelson Mandela dans sa cellule, combattant vaillamment, avec presque un sourire, ce régime de terreur qu’est l’Apartheid. Cette lutte que je trouvais trop tranquille a bouleversé l’idée que j’avais du monde et de son fonctionnement lorsque j’étais adolescente. Lutter sans violence, se tenir debout avec force, tout en ne se laissant pas emporter par toute cette vague de colère qui tue trop souvent!  

Le principe de non-violence demande d’éviter de blesser quiconque en mots, en gestes et demande même d’éviter de le faire en pensée. Est-ce à dire que c’est impossible à atteindre? Qui n’a pas ressenti une montée d’envie violente me jette la première pierre! La violence se cache dans des endroits pernicieux de notre âme et s’infiltre dans une multitude de décisions presque tous les jours… 

Je ne crois pas que nous pouvons atteindre Ahimsa si facilement et tous les jours. Je pense que le principe de non-violence est impossible à atteindre totalement, à moins de vivre en solitaire sur une île déserte ou encore d’être cloîtré dans un monastère bien loin du monde actif. 

Alors, quoi? C’est peine perdue? On abandonne cette quête? 

Non! 

Ahimsa, selon moi, demande qu’on se mette en action en faisant des choix en pleine conscience pour arriver à y toucher de plus en plus. Je ne crois pas que nous pouvons être totalement passifs devant les événements de la vie pour ressentir Ahimsa dans notre vie. 

Je ne crois pas en revanche que la non-violence demande de renier les émotions qui sont liées à nos colères. Nier ce que l’on ressent est le contraire d’Ahimsa, c’est très violent! 

C’est lorsque nous prenons conscience de ce qui nous habite que nous pouvons choisir consciemment la voie de la non-violence.  

Je pense que la meilleure recette pour arriver dans cette voie, c’est de commencer à appliquer à soi-même les principes d’Ahimsa. Comme il est facile d’appliquer les principes de non-violence envers les autres, mais combien plus difficile de l’appliquer envers soi-même! 

Demander que cessent les violences faites aux femmes, aux enfants et aux peuples opprimés va de soi pour la majorité, mais combien se font violence jour après jour?

En faisant taire cette voix intérieure qui supplie qu’on lui donne de l’attention, de l’amour et de l’espace?  

Personnellement, combien d’années me suis-je affamée parce que je tentais d’entrer dans un moule que je croyais universel? Quelle violence de ne pas manger lorsque la faim nous tenaille, de renier nos besoins physiologiques de base! Cet exemple est le mien, l’une des violences que je me suis infligées au fil des années, mais je suis certaine que vous avez en tête des exemples où vous vous êtes mal traités. Dire oui à quelque chose lorsque c’est un non qui hurle en soi, se traiter de nom parce qu’on a oublié quelque chose ou bien qu’on a failli dans une tâche… 

Je vous laisse réfléchir… 

Maintenant, je sais que pratiquer les valeurs d’Ahimsa envers les autres tout en oubliant de le pratiquer envers nous-mêmes en diminue grandement l’impact autour de nous. Comment irradier quelque chose que nous nous refusons?  

Il m’a fallu personnellement dépasser le préjugé que l’autocompassion et la non violence envers moi-même étaient de l’égoïsme afin d’entrer réellement en relation avec Ahimsa. 

Pratiquer et méditer sur Ahimsa a semé en moi des graines de gentillesse et d’ouverture à mes propres émotions et besoins, ce qui me permet de mieux accueillir en étant plus à l’écoute et ouverte à ce que les autres vivent.  

C’est un grand chantier! Je ne peux dire que je peux enlever les cônes orange de la voie de la non-violence, mais j’y travaille, j’y travaille… 

C’est Ahimsa qui me permet de croire que je peux changer le monde, un acte à la fois. 

Et quel est mon outil principal pour y arriver? En cultivant la paix. 

Om Shanti Shanti Shanti 

Shanti, calmons-nous! 

Je vois Shanti comme le petit bras de distance face aux événements de la vie.  

Comme la lune qui influence les marées à distance (pour poursuivre l’analogie). 

Shanti se vit, selon ma compréhension, de façon plus intérieure. La paix se travaille en profondeur et en douceur tout à l’intérieur de nous. Un des chemins pour y arriver, c’est certainement la méditation, qui permet d’arrêter d’agir et de se centrer afin de choisir quelle voie utiliser pour dénouer des nœuds, des événements qui nous bouleversent. 

Shanti, à mon avis, nous lance l’invitation à nous « calmer le pompon »! 

Pratiquer la paix, c’est l’irradier autour de nous et pour y arriver, s’intérioriser, se questionner, s’informer et s’éduquer semblent être des voies à privilégier. 

Encore une fois, un travail de l’ombre qui n’est pas toujours mis en lumière. Un travail lunaire quoi! 

Difficile dans notre vie trépidante, où nous avons mille occasions d’être en réactions et d’agir de façon prompte. Heureusement, les outils qu’offre le yoga nous aident à entrer en relation avec Shanti.  

Que ce soit sur mon tapis, ou sur le coin de mon lit, en me couchant le soir ou en me réveillant le matin, je travaille à trouver et à ressentir la paix. Pour ma santé mentale, mais aussi pour celle des gens qui m’entourent! 

Ahimsa et Shanti : un couple bien assorti! 

Alors maintenant, croyez-vous comme moi que Shanti et Ahimsa sont associés à ce qu’on pourrait appeler un couple puissant qui, main dans la main, permettent un monde meilleur? 

Ils travaillent de concert et aident à créer un cercle de bonté et de tranquillité qui se nourrit de lui-même. 

Trouvez-vous qu’à la fin il devient de plus en plus ardu de définir qui de Shanti ou d’Ahimsa est le plus important pour un monde meilleur? 

Est-ce que Shanti peut vivre sans Ahimsa? J’en doute. Et Ahimsa peut-il survivre sans Shanti? Encore une fois, j’en doute! 

Je crois profondément que les deux se nourrissent l’un l’autre, formant un cercle infini! 

Ne trouvez-vous pas qu’à eux deux, ils nous montrent à la fois le chemin et les moyens pour arriver à développer un monde plus harmonieux? 


Je tiens à remercier Geneviève Caron-Fauconnier et Suzanne Sirois pour les belles pistes d’approfondissement de mes pensées sur le sujet. J’ai toujours su que j’étais bien meilleure grâce aux personnes qui m’entourent et elles en sont des preuves. 


Par Julie Deblois